Valérie Belin Française, 1964
Diplômée des Beaux-Arts de Bourges puis de Paris, Valérie Belin développe une œuvre photographique en série qui interroge les apparences, le corps, la matière et l’artifice.
Dès ses premières années d’études, Valérie Belin s’oriente vers une pratique de la photographie marquée par la prise en compte des propriétés intrinsèques de ce medium, qui la conduit à s’engager dans un véritable approfondissement de son potentiel esthétique ; elle compare souvent sa démarche à celle de certains peintres et artistes minimalistes américains, comme Robert Morris ou Robert Ryman. Ses premiers travaux sont des photographies de sources lumineuses, qui présentent l’aspect de radiographies, ou de pures empreintes laissées par la lumière.
En 1994, Valérie Belin expose pour la première fois son travail à Paris ; elle y présente une série de photographies en noir et blanc d’objets en crista (séries Crystal I, 1993 et Crystal II, 1994). Pour la réalisation de cette série, l’artiste a fait le choix d’un protocole à la fois strict et minimal afin d’éviter l’anecdote de la forme, et pénétrer ainsi au cœur des choses prise de vue sur site : en lumière ambiante, en l’absence de toute mise en scène. Il s’en dégage paradoxalement une esthétique de la présence, dont le véhicule est une empreinte, vécue comme une trace ou une mémoire de l’objet. L’enjeu principal en était la matière, et l’artiste établit ici une sorte de symbiose entre l’essence purement lumineuse des objets et la nature du medium photographique lui-même. Aussi, les photographies sont-elles moins des photographies d’objets que celles de leur spectre lumineux – la fixation sur la surface sensible de la lumière renvoyée par leur corps.
Jusqu’à la fin des années 1990, l’artiste affirmera son style au travers de cet exercice de la série, faisant ainsi émerger une « vérité » de l’objet en le dépouillant de son arrière-plan anecdotique et d’un expressionnisme qui pourrait être lié à son individualité. L’objet est ainsi soumis à un processus d’objectivation sans compromis, et sa représentation semble se retourner contre lui-même par trop d’insistance ; le sujet philosophique qu’il statue est tenu à distance, désamorcé, dépouillé de son drame, comme s’il se dissolvait entièrement dans la photographie.